Soutenance de thèse Enhao Zheng "Inférence lexicale dans la compréhension écrite et acquisition subséquente du vocabulaire en chinois langue étrangère"

Publié le 28 février 2022 Mis à jour le 2 juin 2022
le 11 mars 2022
  9h30
Maison de la recherche, 5 All. Antonio Machado, 31000 Toulouse.
Salle D31
Composition du jury
Mehmet-Ali AKINCI, Professeur des Universités, Université de Rouen (rapporteur)
Arnaud ARSLANGUL, Maître de conférences, INALCO Paris (examinateur)
Heather HILTON, Professeur des Universités, Université Lumière Lyon 2 (examinatrice)
Frédéric ISEL, Professeur des Universités, Université Paris Nanterre (rapporteur)
Vanessa TEILHET, Maître de conférences, Université de Toulouse 2 Jean Jaurès (examinatrice)
Olga THEOPHANOUS, Maître de conférences HDR, Université de Toulouse 2 Jean Jaurès (directrice de thèse)

Résumé
Cette thèse traite de l’inférence lexicale dans la compréhension écrite en langue seconde/étrangère (L2), et de l’apprentissage subséquent du vocabulaire inféré.
L’inférence lexicale consiste en la déduction du sens d’un mot inconnu à la lumière des indices contextuels et des connaissances du lecteur. Ce processus du traitement d’informations concernant le mot inconnu peut aboutir à des gains lexicaux pour ce mot. L’apprentissage d’un mot inféré pendant la lecture étant le sous-produit de la compréhension du texte, l’attention et l’investissement cognitif de l’apprenant sur le mot peuvent influencer le résultat de l’apprentissage (Schmidt, 1990 ; Laufer & Hulstijn, 2001).
Nous nous sommes spécifiquement penchée sur le rôle de la lexicalisation, ou de l’existence d’un équivalent lexical attesté dans la langue maternelle (L1) de l’apprenant pour un mot L2. Les connaissances en L1 restent actives pendant les activités en L2. L’équivalent en L1 à un mot L2 lexicalisé permet à l’apprenant de comprendre plus facilement ce dernier en fournissant l’accès au concept correspondant dans le lexique mental de l’apprenant. En revanche, l’inférence du sens d’un mot L2 non lexicalisé dans la L1 est cognitivement plus coûteuse et plus difficile à cause du manque d’un concept correspondant (Paribakht, 2005), tout comme la rétention subséquente du mot (Heidari-Shahreza & Tavakoli, 2012).
La recherche sur la lexicalisation est rare et, à notre connaissance, la langue cible se limite à l’anglais. Nous avons mené cette étude auprès d’apprenants francophones en chinois L2, afin d’observer l’effet de la lexicalisation sur la lecture et sur l’inférence et l’apprentissage subséquent des mots inconnus présents dans la lecture. Nous cherchions aussi à savoir si une charge cognitive plus importante dans l’input aboutirait à de meilleurs gains lexicaux pour les mots inconnus. 33 participants francophones avec un niveau intermédiaire en chinois ont lu pour la compréhension deux textes comportant 20 mots chinois inconnus, 10 mots lexicalisés en français et 10 autres non lexicalisés. Ils ont ensuite inféré le sens des mots cibles surlignés dans les textes, avant d’accomplir un exercice lacunaire portant sur les mots cibles, soit avec à l’aide d’une liste des mots, soit à l’aide d’un dictionnaire chinois-français à leur disposition. Nous avons utilisé d’une part la technique d’oculométrie pour observer l’attention que les participants portaient aux mots cibles pendant la lecture et, d’une autre part, la méthode de la pensée à voix haute afin de déceler leurs raisonnements pour déduire le sens des mots cibles. Afin d’évaluer l’évolution des connaissances lexicales des mots cibles chez nos participants, nous avons administré le test Vocabulary Scale Knowledge (Paribakht & Wesche, 1997) à trois reprises, un avant l’inférence et deux autres respectivement deux et quatre semaines après l’inférence.
Selon nos résultats, sans effet sur l’attention que les apprenants prêtent aux mots inconnus pendant la lecture, la lexicalisation influence le choix de sources de connaissance des apprenants pendant l’inférence lexicale ; la lexicalisation n’est pas l’élément concluant dans le résultat de l’inférence lexicale, mais les apprenants ont plus de difficultés à retenir un mot L2 non lexicalisé, par rapport à un lexicalisé, à court et à long terme ; enfin, la combinaison de deux tâches post-inférence aboutit à de meilleurs gains pour les mots inconnus notamment sur le plan formel, mais non sur le plan sémantique.
En nous basant sur nos résultats, nous avons conclu cette thèse en suggérant qu’il importe d’encourager les apprenants à apprendre de nouveaux mots L2 via la lecture et selon le guidage de l’enseignant ; davantage de travail explicite est nécessaire pour l’apprentissage des mots L2 non lexicalisés. Il est important d’aider les apprenants du chinois L2 à élaborer dans leur lexique mental des réseaux lexicaux à partir des caractères chinois déjà connus par eux.

Mots-clés : Inférence lexicale, acquisition incidente, lexicalisation, développement du vocabulaire en L2, chinois langue étrangère, oculométrie